Depuis vendredi dernier, l’industrie du taxi est divisée. Certains déchirent leur chemise en disant que le ministre des Transports les a trahis. D’autres sont songeurs et hésitent à se prononcer sur une loi complexe, qui présente clairement des éléments favorables et défavorables. Pour notre part, l’organisation qui représente près des trois quarts des détenteurs de permis de taxi au Québec, nous avons choisi d’appuyer la loi 100. Pourquoi ?
La raison est fort simple : selon nous, UberX sera incapable d’obtenir un projet-pilote. Les exigences pour obtenir un projet-pilote, même sous l’amendement 33, démonisé par certains, sont trop grandes pour la multinationale qui refuse encore et toujours à se plier aux règles, partout dans le monde.
Pour obtenir un projet-pilote, il faut que :
- Uber ait accès un permis de propriétaire ou d’intermédiaire de taxi ;
- Uber rembourse tous les impôts et taxes impayés et obtienne l’accord de Revenu Québec pour les revenus futurs. Le ministre en a pris l’engagement en commission parlementaire jeudi ;
- Tout projet-pilote assure « l’équité envers les titulaires qui exploitent tout permis au moment de [sa] mise en œuvre. » Cette précision, nous l’avons obtenue de haute lutte avant de donner notre accord. Elle signifie qu’un projet pilote ne peut pas faire baisser la valeur des permis ou bouleverser les règles à respecter, car cela constituerait de la concurrence déloyale, ce que la Loi interdit maintenant.
- On ne crée jamais deux catégories de transporteurs de personnes. C’est la première phrase des notes du projet de loi.
Bref, cette loi est imparfaite, mais diriger, faire des choix responsables, ce n’est pas atteindre l’idéal. C’est juger des choix devant nous, ici et maintenant. Appuyer le projet de loi 100, c’était la décision responsable à prendre. Faire une crise, crier au loup, perturber la paix sociale, c’est le choix facile. Exiger une loi parfaite, c’est se condamner à l’échec.
Si la loi n’était pas adoptée, que serait-il arrivé, selon nous ? Nous avions obtenu toutes les concessions que nous pouvions obtenir. Nous étions au stade « à prendre ou à laisser ». Les négociations étaient terminées. La loi aurait été reportée à la prochaine session parlementaire. On reportait tout le débat à l’automne, avec le risque de recommencer à zéro, peut-être avec un nouveau ministre.
Si la loi 100 tombait, voici les gains objectifs que nous allions perdre :
- Suspension des permis de conduire des illégaux de 7 à 90 jours ;
- Des amendes de 25 000 à 100 000 $ pour les illégaux ;
- Le Bureau du taxi de Montréal peut dorénavant saisir des véhicules sans l’aide de la police ;
- Une définition du taxi comme « tout service de transport rémunéré de personnes par automobile » ;
- Une définition du covoiturage qui exclut clairement Uber ;
- La création du service de taxi-partage, qui permettra aux clients de réduire leurs frais et aux taxis de réduire leur empreinte écologique ;
- La mise sur pied d’un fonds de modernisation pour l’industrie du taxi ;
En plus de perdre tout cela, nous aurions possiblement donné le coup de départ à un été de perturbations non désirées. 22 000 familles auraient passé un autre été dans l’incertitude. L’automne aurait été le début d’une nouvelle ronde de négociations et de luttes. L’issue était plus qu’incertaine.
L’INDUSTRIE DEMEURERA D’UNE VIGILANCE EXTRÊME
Pour ceux qui pensent que le Comité provincial s’est laissé berner, détrompez-vous. Nous avons aussi obtenu que tout projet-pilote doive être annoncé publiquement 20 jours avant son entrée en vigueur. Le ministre des Transports le sait : nous allons surveiller de très près la création de tout nouveau projet-pilote. Si un seul d’entre eux n’est pas conforme aux engagements qu’a pris le gouvernement Couillard, il nous trouvera sur son chemin, rapidement et avec force.
Le gouvernement du Québec s’est engagé à ce que les travailleurs du taxi ne subissent aucun préjudice par voie de projet-pilote. Le ministre Daoust l’a encore répété en commission parlementaire jeudi : AUCUN PRÉJUDICE. C’est pourquoi nous avons pris la décision de travailler avec le gouvernement.
Nous voulions atteindre une sécurité suffisante pour l’industrie. Nous l’avons obtenue. Nous enterrons maintenant la hache de guerre, sans pour autant baisser notre garde. Si nous devons reprendre notre lutte plus forts et plus déterminés qu’auparavant, il ne fait aucun doute que nous le ferons. Et les autorités le savent. D’ici là, nous serons de bonne foi et paisible.
Georges Tannous
Président
CPCDIT
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